Avoir passé tout le Pitti 97 en charentaises, caleçon, marcel et peignoir ne va pas nous empêcher de nous livrer à une étude de cas. Les tenues sélectionnées ne sont pas nécessairement les plus réussies mais les plus instructives.
Source : Croquis Sartoriaux
Si vous souhaitez décontracter le port d’un costume, rien ne vaut le duffle coat. Avec ça sur le dos, les rares personnes qui vous remarqueront dans la rue vous prendront pour un geek un peu attardé. A réserver aux adeptes du snobisme inversé les plus extremes.
Une bonne part de la rédaction dira « trop court ! » mais le manteau est du plus bel effet. Un peu court, certes, mais cela reste cohérent avec l’utilisation du velours. On note également que les trois boutons sont assez resserrés et que le cran est sport. Le point de boutonnage est proche de la ligne de taille. A notre sens, ce point sied mieux à son porteur que celui de la veste mais il convient de noter que le point de boutonnage de la veste est cohérent avec la taille basse et la coupe assez serrée du pantalon. On apprécie l’usage de la chemise blanche sans baleine dans une tenue décontractée. La cravate permet de parfaire le camaïeu blanc/beige/marron complété par le manteau marine.
On aurait apprécié une chemise tattersalls mais c’est déjà excellent. Marche aussi avec une cravate tricot marron.
Un costume avec une barbour est toujours un bon choix, surtout lorsque la barbour est plutôt propre. Veillez à ce que la barbour soit plus longue que la veste. Par soucis de cohérence, restez sobre et mesuré dans le choix des textures et couleurs - de façon générale, méfiez vous des prophètes de la texture et de l’originalité, ce sont des ploucs chimiquement purs. Ici, le résultat fonctionne bien en raison du camaieu bleu-gris de l’ensemble et l’utilisation d’une flanelle avec rayures discrètes. La cravate ne jure pas avec l’ensemble.
Penchons nous sur le revers de la veste, vous remarquerez que sa base est assez inhabituelle. (voir photo ci-dessus)
La rayure est franche et donc de mauvais goût (il suffisait de regarder Alan Flusser pour s’en convaincre). La barbour jure avec le costume car d’une part la teinte n’est pas bonne, mais surtout le costume n’est pas assez décontracté pour être porté facilement avec la barbour. Vient ensuite l’écoeurant mélange de l’orange vif du cardigan, du bleu vif de la chemise et de la cravate de mauvais goût (de façon générale: blasons sur une cravate ou une veste = plouc).
A gauche: Je ne sais pas par où commencer: le cran sport sur un croisé plus qu’étrange, les carreaux fenêtres qui jurent avec la casquette et la cravate en plus de ne pas être alignés comme en témoigne la jonction poitrine / bras. L’épaule est ratée et la manche bien trop serrée. Il a trouvé très malin de surcharger encore plus sa veste avec des épaulettes une ceinture dont on se demande l’utilité tant il est boudiné (une veste ceinturée est belle quand elle permet d’en casser l’ampleur)
Au milieu: le gilet marine légèrement satiné porté trop long sur un pantalon taille basse trop serré, le pantalon sera bien évidemment bleu clair pour singer le cadre de 50 ans qui veut faire jeune. Les gants dans la poche, définitivement plouc. Ne portez jamais rien dans la poche d’un manteau, tout au plus vous pouvez porter une pochette dans la poche poitrine de votre veste bien que l’exercice soit périlleux (signe d’affectation ou de plouquitude, c’est selon)
Note: le gilet porté avec un jean ou un chino fait définitivement plouc ou maire socialiste en campagne un jour de marché.
A droite: Peut-être celui qui se tient le mieux. Le velours chamois est plutôt plaisant même si en raison de son côté rustique on aurait préféré une veste simple (on est pas loin du croisé en tweed adoré des ploucs). A noter que la chemise blanche peut tout à fait se porter dans des tenues décontractées, c’est-même plutôt bien vu si on veut faire ressortir certaines couleurs.
Le manteau est complèment raté. Pourtant le type a un bon physique.
On va être rapide: c’est moche. Les revers sont trop larges, l’épaule est ratée, la manche trop courte. Le point de cintrage donne une silhouette tubulaire qui réussit l’exploit de donner des hanches à un type qui semble très mince. Une catastrophe sur tous les plans.
C’est déjà un peu mieux, mais avoir des milliers d’euros sur le dos pour avoir l’air de sortir de chez primark c’est pas génial. Encore une fois, le revers est trop large et l’épaule fait PAP d’entrée de gamme. On note aussi les plis de tension disgracieux au niveau du boutonnage et de l’emmanchure.
Un manteau dont le boutonnage est « distant » (boutons éloignés les uns des autres) est décidément bien laid. La faute à la disproportion engendrée.
Enfin un très beau manteau ! Regardez comment les boutons sont rapprochés sur un plan vertical et concentrés sur la partie supérieure à la taille. Cela permet de dégager une bonne longueur pour le bas du manteau et d’allonger la silhouette. Le boutonnage croisé est permis car il permet de rajouter du coffre et donner de l’épaisseur à une silhouette déjà bien élancée par le manteau. Par ailleurs, l’épaule est bonne et les revers équilibrés (ni trop larges façon proxénète ni trop étriqués façon animateur sur FR2). Notez également les poches boites aux lettres. Demandez ce genre de détail à votre atelier de demi-mesure plutôt que des crans ratés ou des revers XXL.
Une cravate en laine grise marche assez bien avec une chemise blanche et un cardigan marine (même si une chemise bleue serait plus cohérent sur un plan vestimentaire car chaque pièce serait décontractée, le blanc fonctionne mieux car il offre un meilleur contraste avec le gris que le bleu ciel). C’est tout ce qu’il y a à retenir dans cette tenue. Le reste est nul. Mention spécial au pantalon trop court façon Monsieur Hulot ou pantalon de femme (capri pants).
Non, il n’y a aucun défaut de compression de l’image. Il a beau faire 1m72, il parait bien plus petit. Pourtant, tout est fait pour ajouter de la verticalité: l’écharpe en sautoir, le costume trois pièces porté ouvert, un pantalon taille haute, un point de boutonnage au dessus de la ligne de taille. La faute vient surement d’une ouverture de cheville un peu trop ample pour sa configuration.
C’est grotesque.
L’ouverture de cheville est plus étroite mais le résultat n’est guère avantageux, le pantalon est trop serré aux cuisses ce qui contribue à le tasser en attirant le regard sous la ligne de taille.
Sa petite taille se remarque moins ici.
J’imagine qu’il s’agit de l’optimum pour sa morphologie, l’ouverture de cheville n’est ni trop large ni trop serrée. Le pantalon casse un peu pour rajouter de la longueur de jambe. La cuisse a de l’aisance sans pour autant être bouffante.
L’idole des ploucs: le manteau blanc, la pochette assortie aux lunettes de soleil. Au moins, l’écharpe façon cochonou-vichy nous évite la vue d’une cravate brodée d’un 7.
Vous pouvez égayer la tenue avec un foulard si vous avez un col roulé.
De façon générale, une belle écharpe ou un foulard coloré permet d’égayer les tenues les plus austères. La dimension utilitaire d’une écharpe permet de faciliter la justification de ce genre de fantaisie auprès de vos ploucs de collègues.
Col roulé noir avec un croisé. Testé et approuvé
Difficile d’analyser la tenue de gauche car le mouvement peut fausser l’appréciation des proportions. Néanmoins, la veste croisé 6 en 1 confère une allure athlétique au buste alors que les jambes paraissent bien maigrelettes dans ce pantalon étriqué… Un peu d’aisance aurait été du meilleur effet car plus cohérent. Notez cependant cette bonne idée: portez un col roulé avec une veste ou un costume croisé si vous avez peur d’en faire trop.
La tenue de droite ne mérite pas une attention particulière, si ce n’est que tout est très bien coupé. On note cependant que le pantalon gris permet de calmer la veste excentrique. La transition est facilitée par un pull d’une couleur proche de celle de la veste et du pantalon, la lecture de la tenue s’en trouve ainsi facilitée. De façon générale, vous pouvez réaliser de très beau dépareillé avec un pull d’une couleur identique ou proche à votre veste du moment que le pantalon est proche d’un gris moyen (plus vous vous éloignez du gris moyen - vers le clair ou le foncé - et plus le contraste entre le haut et le bas de la tenue sera problématique car trop tranché ou pas assez tranché. Bref, tout est affaire de mesure.
Bel équilibre. Pas de détail bizarroïde pour faire s’exciter les sartorialafistes sur instagram. L’ouverture des quartiers est cohérente avec les revers, qui tombent pile au milieu de la ligne d’épaule. La manche est nette. Le point de boutonnage actif au niveau de la ligne de taille, et le pantalon est également à ce niveau: nickel. La pochette se fond parfaitement dans l’ensemble: le résultat est aussi discret qu’élégant.
Un plouc à l'état pur : veste croisée, cravate et pochette porté avec un jean et des souliers bleus (deux signes infamants ! ). La doudoune en poulyplouc termine le tableau. Bref, à éviter sauf si votre délire c’est de vous déguiser en directeur de supermarché.
Selon nous, c’est la bonne façon d’intégrer un jean dans une tenue sartoriale. La veste doit être décontractée (ici par les motifs et la couleur). Le pull aide beaucoup à la réussite de la tenue car il renforce la décontraction de la tenue ainsi que sa cohérence. Le pull noir s’intègre très bien dans une tenue où le pantalon est foncé. Enfin, nous réitérons que le beige et le marron vont très bien avec le noir ! Si vous faites une tenue aussi décontractée oubliez la pochette.
Les ploucs sont comme les emmerdes, ça vole en escadrille !
Celui de gauche: le manteau croisé porté ouvert. La ligne d’épaule du manteau est ratée (elle ondule avant de chuter misérablement) et la manche manque de netteté. Le costume ne s’en tire pas mieux, le boutonnage actif étant situé bien trop haut pour la morphologie du porteur. On pourrait critiquer l’ouverture disproportionnée du col mais c’est une affaire de goût.
Celui du milieu: La ficelle qui sert de cravate est mal nouée, peut être pour dévier le regard d’un col dont les pointes ne se glissent pas sous les revers du gilet. Le costume présente tous les défauts du PAP entrée ou milieu de gamme: un pantalon étriqué coupé comme un taille basse mais avec un montant disproportionné, un gilet bien trop long (la faute au pantalon), pour les défauts de la veste on pourrait faire un copier coller du précédent article, mais bon pour sa défense le revers est droit fil, c’est déjà ça. Notez qu’il boutonne le dernier bouton du gilet, ignorance? provocation envers les pseudos experts des internets que nous sommes? Mystère.
Le troisième est peut-être le pire du lot: passer nos journées sur instagram n’a toujours produit aucune mithridatisation envers la plouquitude. Nous nous bornerons à souligner qu’il est un bel exemple d’une veste ratée, la ligne de manche trahissant la méconnaissance des règles élémentaires de coupe et de proportions.
Êtes vous plus élégant que lui ?
Ces quelques études de cas nous ont permis de faire émerger quelques règles et conseils à suivre pour avoir des tenues cohérentes. Le prochain article traitera des accords de couleurs, textures et motifs.
5 réflexions au sujet de “Quelques leçons à tirer du Pitti 97”
J’adore ce compte rendu et les looks du Pitti. Il faudrait également faire un billet sur « Comment être classe en caleçon er marcel à la maison »!. Merci!
J’ai pris beaucoup de plaisir à vous lire. Je suis souvent d’accord avec vos critiques. Parfois vous avez le mérite d’attirer mon regard sur des détails que je n’aurais pas vus.
Vos conseils et avertissements sont judicieux.
J’ai beaucoup apprécié l’article sur les coupes des vestes.
Merci à vous. J’apprécie votre site.
À bientôt
Denis
Très bon article et plutôt d’accord avec l’analyse ! Ça m’a aussi bien fait rire et c’est très instructif.
Je mettrait juste 2 petits bémols, le premier sur Mr Kamoshita, la couleur Navy du duffle permet de faire le lien entre formel et casual. Je trouve ça très réussi (comme beaucoup de ses tenues). Pour le gars d’urbancomposition (je ne connais pas son nom), je trouve également ses tenues réussies, même si effectivement la première ne l’agrandis pas. J’aurais peut être laisser tomber les revers du pantalon dans ce cas.
(Pour la photo du manteau blanc, il semblerais que ce soit des gants et non une pochette mais c’est tout aussi raté).
La photo de Peter avec le costume gris de trois pièces est parfait. Les photos de lui en mouvement ne prouvent pas que son pantalon est serré ou ample.
En fait, il y a plus de photos de lui que qui que ce soit. Semble que voux ont quelque chose contre lui. Cet homme a couché avec ta femme?
Bonjour, merci pour cet article, vraiment intéressant.
Je souhaite néanmoins faire une petite remarque sur votre interprétation du ‘dernier bouton du gilet [ouvert ou fermé]’ dans l’avant-dernière photo (« Les ploucs sont comme les emmerdes, ça vole en escadrille »).
Sans commenter sur l’esthétique et la coupe du susdit gilet, remarquez vous bien l’ouverture en forme de V inversé dessous ? Il s’agit d’une normalisation dans la coupe de la fameuse ouverture du dernier bouton… Ainsi donc le fabricant/tailleur ouvre le gilet par son bas pour connoter la décontraction / désinvolture de la mode du dernier bouton déboutonné, et les modeux sartorialistes, synchroniquement, ouvrent le dernier bouton pour connoter la décontraction. S’il s’agit d’éviter de pointer l’incohérence de doubler la supposée ‘décontraction comme règle’ du dernier bouton non-boutonné, soulignons en tout de même la suprême et malencontreusement fortement répandue plouquitude !
J’adore ce compte rendu et les looks du Pitti. Il faudrait également faire un billet sur « Comment être classe en caleçon er marcel à la maison »!. Merci!
J’ai pris beaucoup de plaisir à vous lire. Je suis souvent d’accord avec vos critiques. Parfois vous avez le mérite d’attirer mon regard sur des détails que je n’aurais pas vus.
Vos conseils et avertissements sont judicieux.
J’ai beaucoup apprécié l’article sur les coupes des vestes.
Merci à vous. J’apprécie votre site.
À bientôt
Denis
Très bon article et plutôt d’accord avec l’analyse ! Ça m’a aussi bien fait rire et c’est très instructif.
Je mettrait juste 2 petits bémols, le premier sur Mr Kamoshita, la couleur Navy du duffle permet de faire le lien entre formel et casual. Je trouve ça très réussi (comme beaucoup de ses tenues). Pour le gars d’urbancomposition (je ne connais pas son nom), je trouve également ses tenues réussies, même si effectivement la première ne l’agrandis pas. J’aurais peut être laisser tomber les revers du pantalon dans ce cas.
(Pour la photo du manteau blanc, il semblerais que ce soit des gants et non une pochette mais c’est tout aussi raté).
Merci encore !
La photo de Peter avec le costume gris de trois pièces est parfait. Les photos de lui en mouvement ne prouvent pas que son pantalon est serré ou ample.
En fait, il y a plus de photos de lui que qui que ce soit. Semble que voux ont quelque chose contre lui. Cet homme a couché avec ta femme?
Bonjour, merci pour cet article, vraiment intéressant.
Je souhaite néanmoins faire une petite remarque sur votre interprétation du ‘dernier bouton du gilet [ouvert ou fermé]’ dans l’avant-dernière photo (« Les ploucs sont comme les emmerdes, ça vole en escadrille »).
Sans commenter sur l’esthétique et la coupe du susdit gilet, remarquez vous bien l’ouverture en forme de V inversé dessous ? Il s’agit d’une normalisation dans la coupe de la fameuse ouverture du dernier bouton… Ainsi donc le fabricant/tailleur ouvre le gilet par son bas pour connoter la décontraction / désinvolture de la mode du dernier bouton déboutonné, et les modeux sartorialistes, synchroniquement, ouvrent le dernier bouton pour connoter la décontraction. S’il s’agit d’éviter de pointer l’incohérence de doubler la supposée ‘décontraction comme règle’ du dernier bouton non-boutonné, soulignons en tout de même la suprême et malencontreusement fortement répandue plouquitude !