Démontage d’une paire de Meermin

Avant-propos

Meermin n’est en aucun cas affilié à cet article. Toutes les photos (sauf mention contraire) sont la propriété de Sartorialisme.com et ne peuvent être utilisées sans autorisation.

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La paire qui fait l’objet du démontage est présentée dans notre article précédent et a été achetée neuve début 2018, il s’agit d’un mocassin noir de type penny loafer en montage Goodyear sous rainette. Le modèle n’existe plus dans la collection actuelle de la marque. Cette paire compte environ une trentaine de ports et n’a jamais été portée sous la pluie, elle est donc en très bon état.

Cet article est par définition technique et assume que le lecteur a lu notre article “Qu’est-ce qu’un soulier de qualité”. Néanmoins, voici une illustration comportant quelques indications quant au vocabulaire qui va être utilisé. (Source: Alain Madec)

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Le démontage

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On commence par le démontage du bloc talon. Ce dernier est livré préfabriqué à la marque comme c’est la norme dans l’industrie. À titre informatif, traditionnellement les bottiers assemblent le talon couche par couche, dans le prêt-à-porter (PAP) cette façon de faire ne se rencontre que chez certaines marques du haut de gamme. Le bonbout est du type “cuir coin caoutchouc” et est maintenu par 6 petites pointes en laiton dont le rôle est surtout décoratif.

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Le bonbout en caoutchouc est exposé, on va pouvoir le retirer.

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Le bonbout en caoutchouc a été retiré, et l’on voit maintenant le premier sous bout. Ce dernier a été quadrillé pour permettre à la colle néoprène de mieux adhérer et donc de bien cimenter les deux pièces.
Cette photo permet également de voir l’état de la semelle d’usure, cette dernière bien qu’étant récente est assez usée surtout au niveau du bout. Ce n’est pas étonnant, à ce prix là vous n’avez pas du Bastin ou du Garat, patin et fer sont obligatoires ou en quelques mois vous pouvez trouer votre semelle.

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Le premier sous bout a été enlevé et l’on devine en dessous les clous vissés qui assurent le maintient du bloc talon à la première de montage. Le bloc talon est en cuir, c’est du croupon tannage végétal. Pour du PAP d’entrée de gamme c’est très bien. Il est rare dans cette gamme de prix de trouver du cuir où il est beaucoup plus commun de trouver des blocs talon en caoutchouc, salpa, voire même plastique avec enrobage “cuir”.

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On retourne la chaussure et on enlève la demi première de propreté (à droite), il est mesquin de ne mettre qu’une demi première de propreté mais c’est une économie courante dans cette gamme de prix.
La demi première de propreté a été collée sans attention particulière, dessus vous pouvez distinguer un “made in Spain” trompeur. Ce soulier date de la période où Meermin faisait fabriquer les souliers en Chine pour ensuite les “finir” en Espagne, cela démontre encore une fois qu’il ne faut pas se baser sur les indications de provenance. La production actuelle est exclusivement Chinoise.

En dessous de la demi première de propreté se trouve un morceau de polyéthylène ou de polypropylène blanc de faible densité, cela sert de padding pour le talon. On est très loin d’avoir quelque chose de qualitatif ou de confortable, mais encore une fois dans cette gamme de prix c’est la norme. En dessous de ce padding se trouve la première de montage en cuir avec les 7 clous vissés qui servent à maintenir le bloc talon. La première de montage est plutôt épaisse par rapport à la concurrence et présente l’avantage d’être en cuir, certaines marques parfois beaucoup plus chères utilisent du salpa…. coucou Alden.

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Les clous vissés maintenant exposés après avoir retiré une autre couche du bloc talon. La base du talon a été quadrillée pour permettre une meilleure adhésion de la colle néoprène au premier sous bout du bloc talon. Certain fournisseurs ne prennent pas le temps de quadriller cette partie et rendent le bloc talon beaucoup plus facile à démonter puisque la colle néoprène n’adhère pas aussi bien.

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Le bloc talon a été difficile à démonter ce qui laisse supposer une bonne durabilité dans le temps. Le fait que ce dernier soit fait de cuir et qu’il soit maintenu par 7 clous vissés et de la colle néoprène est un bon point. Beaucoup de marques se contentent bien souvent de 4 clous simples, parfois 3. La qualité dans le monde du soulier n’est pas linéaire, une paire de Meermin à 190€ peut avoir un meilleur bloc talon qu’une paire de Vass à 500 (qui est passé au salpa, du moins sur certains modèles) ou qu’une paire d’Alden à 650. Cette photo permet de voir la roulette d’emboitage, cette dernière n’est pas très marquée ni très belle mais elle a le mérite d’exister.

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On s’attaque maintenant à la couture petit point. Le plus simple est d’insérer un tournevis à tête plate pour séparer légèrement les semelles et ensuite couper la couture à l’aide d’un tranchet ou d’un cutter. Cette paire n’est pas destinée à être remontée, j’ai effectué le découpage rapidement et donc peu proprement. Je n’ai pas non plus pris la peine d’enlever les fils.

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Une fois la couture petit point coupée on peut “ouvrir” le soulier. Le rempli est en pâte de liège et est en bon état, cela n’est pas étonnant puisque la paire a été peu utilisée.

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Le cambrion est monté sous un morceau de salpa et l’ensemble est maintenu en place par un clou vissé ainsi que de la colle néoprène.

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Sans surprise le mur de montage est collé, le fil qui sert à la couture trépointe est noir et la couture a une densité de 2 spi. La bande de toile est de taille moyenne. Pour un mocassin un montage Blake aurait été plus approprié notamment pour sa souplesse, mais Meermin base sa communication sur le Goodyear master race. La tige et les renforts seront pourris avant le montage. Un non sens purement commercial pour appâter les débiles.

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Une fois que l’on a retiré le clou vissé on ôte le cambrion. Sans être difficile à enlever ce dernier résiste plus qu’avec d’autres marques où est il possible de l’enlever juste en soufflant dessus. Je déconne mais pas tant que ça. Le cambrion est en acier et est protégé par un morceau de salpa.

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L’emplacement du cambrion. Le fil se ballade est celui de la trépointe.

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Un petit détail qu’il est intéressant de noter, le couche point est maintenu en place par 6 pointes (semences), ce qui est la technique traditionnelle. De nos jours il est beaucoup plus commun d’utiliser des agrafes, du moins sur les productions qui sortent des usines Européennes.

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Sans la moindre surprise le bout dur est thermocollé comme sur pratiquement l’intégralité des marques de PAP. Toutefois, le celastic (ou autre thermoplastique utilisé) est de médiocre qualité, il est fin et peu rigide à la limite du papier à cigarette. C’est une économie de bout de chandelle sur un élément structurant important.

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Le contrefort est là aussi, sans surprise, en celastic ou tout autre matière thermoplastique. Comme sur le bout dur, il est extrêmement fin et peu rigide. Contrairement à ce qui a été avancé par le nain narcissique et alcoolique qui s’est autoproclamé snob de la pompe, il ne fait pas bon mégoter sur les contreforts. Il s’agit d’une pièce d’usure, structurante, et sur des mocassins il est particulièrement sollicité puisque beaucoup de gens n’utilisent pas de chausse-pied pour les mettre. Si un contrefort synthétique casse, il n’est pas réparable.

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Une comparaison rapide qui illustre le problème. Nous avons ici le pied droit de notre paire de Meermin (pied qui est resté intact). Et le pied gauche d’une paire de mocassin Carmina. En appliquant une pression sur l’arrière du contrefort il est facile de voir à quel point celui-ci se déforme. La pression est la même et il est évident que la paire de Meermin est extrêmement souple à l’emboitage, alors que la paire de Carmina est plus rigide. Il y a une raison derrière cela, Meermin utilise un celastic de qualité médiocre, Carmina utilise du salpa. Je ne vais pas réexpliquer la différence entre contreforts en celastic, salpa, et cuir, cela a déjà été fait dans notre article sur ce qu’est une chaussure de qualité.

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Les renforts sont simplement fabriqués dans une toile collée. Les ailettes de renfort en cuir sont uniquement présentes sur certaines marques haut de gamme.

Conclusion

Avant tout chose, il est important de comprendre que cette paire ne reflète pas nécessairement le reste de la production de Meermin. Chaque modèle est fabriqué selon son propre cahier des charges. Concrètement ce n’est pas parce que ce modèle avait un talon en cuir que c’est le cas des autres mocassins de la marque. Cela est d’autant plus vrai que la marque a vu la qualité de ses productions baisser de manière significative ces derniers temps, du moins en ce qui concerne les finitions et l’attention portée aux détails.      

     
Au final, quel est l’intérêt d’utiliser un montage Goodyear sur un soulier qui va devenir difforme à cause d’éléments structurants fabriqués dans du papier toilette glorifié ? L’intérêt pour la marque est de s’attribuer les qualités de durabilité du montage, pour les transposer au reste de la chaussure. Ainsi on opère le glissement d’une chaussure au montage durable, vers une chaussure durable. Habile, mais ce n’est pas la réalité. Meermin n’est pas le seul coupable de cette pratique, loin de là. Il faut garder à l’esprit qu’il s’agit de chaussures d’entrée de gamme, et que le concurrence n’est pas nécessairement meilleure sur ce point. Ou si elle l’est, elle pèche sur d’autres aspects. Il faut en plus souligner qu’avec un bon roulement et un bon entretien il est parfaitement possible de conserver une paire de Meermin plusieurs années sans soucis.     

     
Le bilan global est donc quand même plutôt positif. Le travail sur le bloc talon et la première de montage est particulièrement louable. L’utilisation de cuir pour ces deux éléments est assez rare dans cette gamme de prix et l’épaisseur de la première de montage est tout à fait correcte. La tige ne présentait pas de défauts majeurs mais ne mérite pas non plus d’éloges.      

Loding en difficulté, quel avenir pour la marque d’entrée de gamme ?

Article mis à jour le 14 Janvier 2022. La procédure de sauvegarde a été convertie en procédure de redressement judiciaire.

Avant-propos

Depuis le 7 Janvier 2021 Loding fait l’objet d’une procédure de sauvegarde. La procédure de sauvegarde a pour objectif de faciliter la réorganisation de l’entreprise afin de permettre la poursuite de l’activité économique, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. La société connaissait déjà des difficultés depuis plusieurs années et la situation économique actuelle n’a certainement rien arrangé. Loding n’est pas la seule entreprise du milieu à faire l’objet d’une procédure collective. Ceux qui nous suivent sur notre Instagram savent déjà qu’Alfred Sargent, le chausseur Britannique a été placé en liquidation judiciaire le 28 Janvier dernier. Sans parler des mystérieuses faillites d'un blogueur au nez refait, qui a probablement réinvesti son capital social chez Cifo... À travers cette procédure de sauvegarde Loding espère pouvoir éviter le même sort et poursuivre son activité.

Histoire de la marque

Loding est une entreprise familiale fondée par Michel et Vadim Gozlan qui en 1998 décident d’ouvrir une boutique de chaussure rue de Berri à Paris. Je vous passe les détails sur l’histoire de la société, on n’est pas dans Dallas et cela n’a aucun intérêt, mais sachez tout de même qu’avant de s’appeler Loding, la société s’appelait Olding, la dénomination sociale changera le 10 Janvier 2000 et que chez les Gozlan on aime bien les bourrins. La famille compte plusieurs éleveurs et propriétaires de trotteurs, vous savez donc maintenant d’où vient le nom et le logo de la marque. Parallèlement à Loding, Michel Gozlan est également le fondateur de la société Mario Dessuti. L’équivalent de Loding, mais pour les costumes. Lancée en 1988 cette marque a un concept simple : un prix unique et attractif (1000 Francs le costume à l’époque), un réseau de boutique luxueuse (en apparence) à travers la France et des produits plutôt qualitatifs pour de l’entrée de gamme avec un fabrication Française. Je précise cela car Mario Dessuti fait actuellement l’objet d’une procédure de redressement judiciaire.

Le site internet de Mario Dessuti annonçant le redressement judiciaire de la marque (Source: Mario Dessuti)
Le site internet de Mario Dessuti annonçant le redressement judiciaire de la marque (Source: Mario Dessuti)

Loding se développe rapidement car de la fin des années 90 au début des années 2000 l’entreprise est relativement seule sur son créneau, cela va lui permettre d’ouvrir plusieurs boutiques sur le territoire Français. Son modèle est basé sur celui de la société sœur Dessuti à savoir un prix unique, un vaste réseau de boutiques et un produit relativement qualitatif. En 2007 la décision est prise de partir sur un modèle de franchise et la marque pousse agressivement son concept afin de trouver des partenaires. Après le décès de Michel Gozlan en 2012, Nathan et Vanessa Gozlan respectivement son fils et sa fille prennent en charge la gestion de Loding ainsi que de Mario Dessuti et continuent de faire évoluer les marques, ou du moins c’est ce qu’ils tentaient de faire.

Les grandes heures

Le Loding de la grande époque, c’est un réseau de franchisés en augmentation pratiquement constante, vendant tous des chaussures en private label fabriquées par Carlos Santos au Portugal. Le prix est fixé à 150€ pour l’intégralité des modèles. Le montage est un Goodyear sous rainette tout ce qu’il y a de plus banal, mais à l’époque il y a encore peu de concurrence sur le Goodyear à bas prix. Il y a bien quelques modèles en Blake mais ils sont encore assez rares. Les cuirs sont corrects et il y a une vaste sélection de modèles. Tous ne sont pas du meilleur goût, certains sont même totalement douteux, mais il y a suffisamment de modèles pour que chaque plouc y trouve ce qu’il cherche. La prospérité est au rendez-vous, le business marche fort. Ça tombe bien puisque c’est l’un des arguments les plus vendeur que l’on puisse avoir lorsqu’on essaye d’étendre un réseau de franchisés. Et c’est justement ce que la marque s’attache à faire, avec un succès impressionnant, Loding promeut son modèle de franchise et est présent sur beaucoup de salons spécialisés sur le sujet comme le démontre la vidéo ci-dessous.

Vincent Di Nino, alors directeur du développement de Loding en train de vendre la Franchise. Il vante le passage de 10 à 24 points de vente en 1 an et demi, espère en ouvrir entre 8 et 10 points de vente en 2009, avec pour objectif final 50 points de vente en France. Et puis, pourquoi pas se développer à l’internationale pour la suite, rien n’est trop gros l’Espagne, le Portugal, la Suisse, le Luxembourg sont au menu pour peu que le Dieu shekel le veuille bien.

Et le fait est que le Dieu shekel est propice. Le réseau Loding, c’était 37 magasins implantés dans 3 pays, 14 millions d'euros de chiffre d'affaires, 13 ouvertures en 2009 et 8 projets d'ouvertures en 2010. En 2012 la marque réalise un chiffre d’affaire total de 22 millions d’euros, et finit par totaliser 68 points de vente. Une réussite incontestable. La marque bénéfice également du regain d’intérêt pour le style classique. Elle chausse toute une génération de jeunes, et sert souvent de première paire en cuir pour beaucoup de gens, dont de futurs calcéophiles forcenés. À l’époque Meermin n’a pas encore percé, la vente par internet n’est pas encore aussi prépondérante qu’elle l’est aujourd’hui, et les autistes d’école de commerce bouffeurs de quinoa importé n’en sont qu’à leurs balbutiements. Mais cela n’allait pas durer.

Le début des difficultés

L’impressionnant réseau de la marque n’est pas sans faille. L’implantation des boutiques n’est pas toujours judicieuse et les franchisés ne sont pas tous compétents. Les conseils prodigués varient énormément en qualité en fonction des lieux d’achat. Beaucoup de clients reçoivent des chaussures qui ne leur vont pas, ou on leur explique que pour entretenir une paire il faut bien la cirer…Commence le jeu des chaises musicales, un certain nombre de franchisés ferment, d’autres ouvrent ailleurs. À partir de 2014/2015 la marque voit la concurrence sérieusement se développer. L’effet Meermin est passé par là, l’entreprise sino-majorquine propose des chaussures à des prix compétitifs, un système de MTO original, et une grande variété de modèles et de formes. Meermin comprend également le potentiel qui est présent parmi les blogs et l’internet. La marque s’acoquine avec toutes les influenceuses possibles et imaginables, elle inonde le net de reviews et fait jouer une communication très agressive. Elle parle aussi le langage des lecteurs de blog et autres amateurs, en mettant en avant, sur le papier du moins, des éléments laissant penser à une production de qualité. Elle détaille les avantages de son parc de formes, elle met en avant une fabrication “traditionnelle”. Tout ceci n’est bien évidemment que de la communication, mais la réalité est que dans l’entrée de gamme il y a un avant et un après Meermin. En parallèle, Loding ne comprend pas les attraits de l’internet et peine à communiquer avec sa cible, les jeunes actifs. La marque joue plutôt l’image du luxe accessible, avec ses boutiques à moquette épaisse et à fauteuil en cuir. Elle ne communique pas sur son parc de forme, normal, elle n’en a pas puisqu’elle travaille avec les formes de Zarco. Chez Loding le chaussant c’est accessoire, beaucoup de franchisés ne savent même pas ce dont il s’agit. Comme ils ignorent tout des tenants et aboutissants du soulier. Pour tenter de se rattraper la marque lance alors différentes gammes d’accessoires, elle propose maintenant des chemises, des cravates, des pulls, mais la qualité n’est pas au rendez-vous, et l’on devine que ces accessoires font l’objet de marges juteuses. En parallèle, le coût du cuir connaît une augmentation, les marques en private label commencent à apparaître un peu partout et face à ces différents facteurs Loding augmente ses prix de 150€ à 160€ puis à 180€ et ainsi de suite au fil des années pour arriver au 195€ d’aujourd’hui.

Les difficultés s’accumulent

Pour lutter face à une concurrence toujours plus féroce Loding décide de se développer vers le bas, comprendre par là, faire des produits moins chers et augmenter les marges. Une décision étrange quand on prétend faire du luxe, mais qui sait peut-être qu’ils espéraient trouver du pétrole. Jusque-là Loding faisait produire ses chaussures en private label essentiellement chez Zarco. Il y a peut-être eu quelques modèles produits ailleurs mais Loding se limitait à l’Europe jusqu’à ce que la société trouve de nouveaux fournisseurs Inde, tout en conservant une partie de la production Zarco. Seul problème, la marque n’indique pas de façon transparente la provenance de ses chaussures, et les modèles Indiens ne font pas l’objet d’une ligne à part à moindre coût. Ils sont directement intégrés dans le cœur de la gamme. J’en veux pour preuve cette image qui est tirée de la vidéo réalisée pour Loding par Mayday, un magazine spécialisée dans l’assistance aux entreprises en difficulté.

Des Chelsea modèle 367 en cousu Goodyear dans l’usine Indienne qui assure la production de Loding. Les semelles utilisées sur les modèles Indiens sont facilement reconnaissables et sont présentes sur plusieurs modèles à 195€ de la marque. (Source: Mayday)
Des Chelsea modèle 367 en cousu Goodyear dans l’usine Indienne qui assure la production de Loding. Les semelles utilisées sur les modèles Indiens sont facilement reconnaissables et sont présentes sur plusieurs modèles à 195€ de la marque. (Source: Mayday)
Les semelles Indiennes (Source: Loding)
Les semelles Indiennes (Source: Loding)
Les semelles Portugaises (Source: Loding)
Les semelles Portugaises (Source: Loding)

Il est possible que Loding ait volontairement utilisé ce stratagème pour pouvoir faire fonctionner sa politique de prix unique. Les modèles Indiens coûtaient moins chers et tiraient les marges vers le haut alors que les modèles Zarco étaient là pour assurer le coté qualitatif, sans que le client lambda ne sache si sa paire venait de Zarco ou du tiers monde. En plus de cela, les modèles en Blake se multiplient également et globalement la qualité est à la baisse. Dans cette stratégie de développement par le bas la marque lance aussi ses premiers modèles de baskets. C’est formidable ça les sneakers, ça coûte trois fois rien à produire et ça se vend à peine moins cher qu’une paire montée en Goodyear.

En 2017 Loding lance en grande pompe son “bar à patine”, ils vont jusqu’à se payer 3 pages dans le numéro 53 de Trépointe pour promouvoir la chose tout en annonçant “s’être réinventé”. Nous reviendrons là-dessus. L’intérêt pour la marque de proposer des patines est double, d’une part cela permet d’utiliser du crust, et le crust c’est bien quand on perd de l’argent parce que c’est moins cher que le box calf. D’autre part cela permet de nourrir l’espoir de devenir une sorte d’Altan ou de Legazel du pauvre et d’attirer une clientèle nouvelle. Loding propose donc pour la première fois des paires en crust, avec une patine à prix unique de 70€. Mais c’est trop peu, trop tard. La direction a totalement ratée le train. Entre 2008 et 2013, pendant les années où la patine était en vogue, le patineur Parisien Paulus Bolten a décapé et patiné des centaines de paires de Loding. C’est bien simple à une époque il n’y avait pratiquement que ça chez lui. Certains clients lui demandaient même si il était possible de patiner autre chose. Loding est complètement passé à côté de cette tendance lorsqu’elle était juteuse et ce n’est pas son patineur sapeur de Ouagadougou qui réussira à sauver la situation. La clôture de l’exercice comptable pour l’année 2017 se fait dans la douleur malgré un chiffre d’affaire de plus de 9 millions d’euros l’entreprise enregistre une perte de 811 964 euros. C’est un échec.

En plus d’avoir raté la vogue des patines Loding a raté son expansion à l’international et a ignoré de nouveaux marchés porteurs, comme les Etats-Unis, qui ont été le territoire de chasse favori de Meermin. Les sino-majorquins s’y sont rapidement implantées et y ont installées une unité de stockage ainsi qu’un magasin. L’effort de Loding s’est limité au lancement d’un site internet pour le continent Nord-Américain, qui ne propose en réalité rien de différent, si ce n’est la géolocalisation par cookies. De cette façon les clients d’Outre-Atlantique doivent acheter les paires au prix fort, car les prix ne sont pas les mêmes qu’en France. Est-ce par mépris, par arrogance, ou par crasse ignorance commerciale, les prix de Loding en Amérique sont presque le double de ce qu’ils sont en France. Comptez $375 pour un cousu Goodyear, $275 pour du Blake, ce qui au taux de change actuel équivaut à 308€ et 225€… Pour rappel, les prix de Loding en France sont de 195€ pour du GW et de 140€ pour du Blake. Insulte suprême, les prix Américains sont annoncés comme déduit de la TVA, il n’en est rien. Certes le client Américain ne paye pas la TVA Française de 20 %, mais le prix n’est pas pour autant 20 % moins cher. En réalité ces 20 % vont dans la poche de l’entreprise, mesure désespérée d’une société à la dérive. Forcément, ne bénéficiant là-bas d’aucune image de marque, étant de parfaits inconnus, sans aucune présence, ni aucun effort marketing et avec des prix disproportionnés la marque réalise là-bas des scores médiocres. Alors, certes il y a bien les 2 magasins à Toronto, mais même avec toute la bonne volonté du monde Toronto ce n’est pas NYC. Pour 2018 les ventes à l’export représentaient à peine plus de 800 000 euros, alors que celles en France dépassaient les 8 millions d’euros.

Le site Internet Français de Loding. (Source: Loding)
Le site Internet Français de Loding. (Source: Loding)
Le site Américain de Loding. Notez les prix gonflés et l’absence de solde. (Source: Loding)
Le site Américain de Loding. Notez les prix gonflés et l’absence de solde. (Source: Loding)

En l’absence de solution immédiate à ses problèmes de rentabilité, la marque commence alors à se perdre et à verser petit à petit dans une sorte de schizophrénie. Elle s’imagine être une marque de haut de gamme aux boutiques à l’atmosphère cossue et aux fauteuils en cuir vendant un produit de luxe, mais attention, de luxe abordable. Ce mirage du luxe abordable sans être la cause directe de la perte de la société est responsable d’une communication mégalomane, incompréhensible et pleine de désillusion. C’est ainsi que Loding lance en 2018 une chaîne Youtube absolument fascinante d’incompétence dont l’échec est tel que même les aveugles en perçoivent l’horreur. Je vous laisse juger par vous-même.

C’est également durant cette même année 2018 que la marque enregistre une perte totalisant cette fois 1 274 571 euros. 462 000 euros de plus que l’année précédente. On pourrait penser que voir l’entreprise saigner à blanc pousserait les propriétaires à arrêter de jeter de l’argent pour les clips vidéos abscons mais il n’en est rien. La marque entretient des liens avec Pointure, qui est l’un des principaux média qu’elle utilise pour communiquer. Pointure qui est un magazine de niche, qui s’adresse surtout aux calcéophiles  de salon sans aucun savoir technique et dont la principale caractéristique est d’avoir plus d’argent que de bon goût. En collaboration avec Pointure et la société sœur de Loding, Mario Dessuti le clip suivant est réalisé :

Musique catchy, mépris des responsabilité, diversité inclusive mettant en scène les prix Nobels de demain dans leurs tenues de ploucs. L’un fait du skateboard, l’autre semble prit de convulsions ou exécute des danses ethniques, on ne sait pas très bien. La cible est clairement jeune, sauf que les jeunes ne lisent pas Pointure et les mannequins présent dans la vidéo n’existent que sur Instagram ou dans l’imaginaire des gauchistes mondialistes. La réalité est autre, mais les publicitaires ont leur vision du monde.

Plongé dans une situation économique déjà critique Loding est frappé de plein fouet par la fermeture des boutiques, le cœur de son système de vente, et se retrouve dans une impasse. La solution ? Faire un nouveau clip vidéo pardi. Cette fois la marque est à la recherche de nouveaux investisseurs.

Musique dramatique avec des violons de rigueur, images de boutiques de luxe, de tranchets et d’usine en Inde... la marque se prend à son propre rêve d’être un ambassadeur du luxe. L’effort est pathétique et désespéré.

Quel avenir pour la marque ?

Loding n’ont jamais été en mesure de comprendre les enjeux ni de la communication ni de l’internet. Ils se sont retrouvés prisonniers d’un système commercial basé sur la franchise daté difficile à restructurer à cause de sa lourdeur et de sa rigidité. Les gestionnaires ont été incapable d’anticiper les changements clés qui ont impacté leur secteur, que ce soit avec Loding comme avec sa société sœur Mario Dessuti et payent aujourd’hui le prix de plusieurs années passées dans l’incapacité de redresser la situation. La procédure de sauvegarde dont Loding fait l’objet va tout d’abord comporter une phase d’observation qui peut durer jusqu’à 6 mois, renouvelables. Un plan de sauvegarde sera ensuite proposé pour sauver la société. Peu importe le contenu du plan il ne fait aucun doute que Loding est amené à changer de façon radicale, pour le meilleur ou pour le pire.

Meermin : des chaussures de qualité à moins de 200€ ?

Avant-propos

Meermin n’est en aucun cas affilié à cet article. Toutes les photos sont la propriété de Sartorialisme.com (sauf mention contraire) et ne peuvent être utilisées sans autorisation.

Cet article va être un peu différent de ce que nous proposons d’habitude. Tout d’abord il sert de préambule à notre premier démontage (non verbal) qui sera bientôt publié. Par ailleurs il va nous permettre de conduire une expérience grandeur nature et de montrer ce qu’il est possible d’attendre en tant que client d’une marque, en l'occurrence Meermin. Ensuite cet article va également vous aider à identifier les différents types de défauts qu’il est courant de voir sur les chaussures. Enfin il s’agit de démontrer une fois pour toutes pourquoi l’achat en boutique est toujours préférable à l’achat en ligne.

Pour la réalisation de cet article nous avons acheté 5 paires de Meermin sur une période s’étalant de 2018 à 2021 et cela dans le but de reproduire l’expérience d’un client normal. Le choix de la marque s’est basé sur le fait que Meermin est une marque extrêmement populaire qui au fil des années s’est imposée sur le segment de l’entrée de gamme. Dès lors, il semblait logique de voir si cette réputation est justifiée et surtout si elle résiste à l’épreuve du temps. Concrètement, il est très rare de pouvoir avoir des retours fiables sur une marque. Certes il existe les forums qui regroupent une grande quantité d’informations mais cette dernière est souvent noyée dans une masse informe d’interventions inutiles dans laquelle il faut trancher à coup de hachoir. Les reviews google ? Si je vous disais qu’un vieux fou propriétaire de plusieurs marques de pompes passe son temps à aller dénigrer ses concurrents (et anciens partenaires) avec de faux avis clients à 1 étoile ? Il reste ensuite les influenceuses mais l’on est en droit de douter de la sincérité et de l’impartialité de quelqu’un qui exhibe une garde-robe de dictateur africain tout en étant en faillite personnelle, soyons sérieux. Notez que je n’ai rien contre essayer honnêtement un produit reçu gratuitement, tant qu’il ne s’agit pas de sucer. Malheureusement bon nombre de gens s’adonnent à la gorge profonde sans même que les marques ne leur demandent, une servilité commerciale doublée de la trouille de perdre leur gagne-pain se chargent de les transformer en avaleuses professionnelles.

Le genre de “reviews” que l’on trouve sur le net. Choc, on apprend que les semelles en cuir ça glisse “relativement”.  Trouver des points négatifs imaginaires et souvent inoffensifs est une astuce courante dans le milieu des influenceuses qui permet de donner l’impression au lecteur que le test est “légitime”. (Source : Comme un camion)
Le genre de “reviews” que l’on trouve sur le net. Choc, on apprend que les semelles en cuir ça glisse “relativement”.  Trouver des points négatifs imaginaires et souvent inoffensifs est une astuce courante dans le milieu des influenceuses qui permet de donner l’impression au lecteur que le test est “légitime”. (Source : Comme un camion)
La réputation de Meermin sur internet est pour le moins polarisante. Qui croire ? Les 63 % d’avis négatifs ou les 28 % d’avis dithyrambiques ? Je suis prêt à parier que les 63 % ont eu affaire au service client de la marque. (Source : Trustpilot)
La réputation de Meermin sur internet est pour le moins polarisante. Qui croire ? Les 63 % d’avis négatifs ou les 28 % d’avis dithyrambiques ? Je suis prêt à parier que les 63 % ont eu affaire au service client de la marque. (Source : Trustpilot)

Présentation de Meermin

Le siège social de Meermin, au premier étage vous pouvez même voir quelques boites de chaussure entassées devant la fenêtre. (Source : Google Maps)
Le siège social de Meermin, au premier étage vous pouvez même voir quelques boites de chaussure entassées devant la fenêtre. (Source : Google Maps)

Toute les marques se dotent d’une histoire et s’inventent une légende, c’est bon pour le business. Lisez notre article sur les arnaques dans le milieu de la chaussure si vous voulez en apprendre plus là-dessus. Toujours est-il que toutes les marques s’attachent à leur petite image d’Épinal et Meermin n’est pas différent des autres. En fonction des périodes vous avez soit le droit au couplet sur la petite entreprise familiale d’Espagne fondée par José Alabladejo qui se bat contre les géants de ce monde pour faire des chaussures qualitatives à des prix abordables. Soit vous avez le droit à l’histoire de la petite start-up qui vante sa stratégie agressive et disruptive parce qu’ils sont trop fous et qu’ils vendent directement au client, tout en faisant des marges “ridiculement” basses. Parce que si vous en doutiez, le secret de Meermin, ce n’est pas sa production Chinoise, non, ce sont ses marges “ridiculement” basses. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le directeur lui-même.

La théorie économique selon le directeur de Meermin, faire produire en Chine est plus cher qu’en Europe. Ça en dit long sur le QI des clients qui avalent le mensonge et sur son degré d’intégrité.  (Source : Stitchdown).
La théorie économique selon le directeur de Meermin, faire produire en Chine est plus cher qu’en Europe. Ça en dit long sur le QI des clients qui avalent le mensonge et sur son degré d’intégrité.  (Source : Stitchdown).

C’est pour cette raison que la majorité des entreprises occidentales font déménager leur capacité de production en Chine depuis des années, produire plus cher ailleurs ce qu’elles peuvent faire moins cher chez elles. Ça n’est pas du tout pour bénéficier des facilités locales en matière de législation, de taxation et de coût de la main d’œuvre. En réalité Meermin est une petite multinationale au capital social avoisinant les 2 millions d’euros, qui dispose de sociétés dans plusieurs pays du monde et dont le chiffre d’affaire global dépasse les 10 millions d’euros. Pas mal pour une “petite entreprise familiale avec des marges basses”.

Examen des chaussures

Toutes ces paires ont été achetées sur le site internet de la marque, nous n’avons donc pas eu la possibilité d’examiner les chaussures avant achat. Le pied gauche est celui qui est utilisé pour la majorité des illustrations, mais les deux pieds sont examinés et dans certains cas les illustrations proviennent des deux. Les différences majeures entre pied droit et pied gauche sont mentionnées, les différences mineures ou anecdotiques sont ignorées.

Paire numéro 1

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Cette paire est la plus ancienne du lot, achetée début 2018 il s’agit d’un mocassin de type penny loafer en cousu rainette. C’est la seule paire du lot à avoir été portée ce qui explique les plis de marche au niveau du plateau. C’est également cette paire qui fera l’objet d’un démontage donc nous n’allons pas nous attarder dessus puisqu’elle fera l’objet d’une analyse en profondeur. En revanche la paire est relativement exempte de défaut, en dehors de quelques coutures pas très droites sur la tige et autres petits défauts esthétiques mineurs. Cela n’est pas illustré en photo mais cette paire porte la mention “made in Spain” sur sa demi première de propreté.

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La paire présente l’un des problèmes récurrents chez Meermin, la séparation trépointe / couche point qui est faite à l’arrache. Ce n’est pas un défaut rédhibitoire, et cela ne demande pas de renvoyer la paire. La roulette d’emboitage n’est pas très belle, et l’application de la déforme un peu crasseuse mais ce ne sont pas des défauts, juste un signe du manque de soin porté par les ouvriers.

Paire numéro 2

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Cette paire est un derby de fin 2018 en country calf, un veau grainé donc. Pour rappel un cuir grainé est un cuir normal qui a été passé sous presse afin de lui imprimer un motif… et accessoirement pour en masquer les défauts.

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La storm welt a été terminée de façon pour le moins brutale, le problème est plus esthétique qu’autre chose.

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La couture petit point (PP) est plutôt régulière et ne se ballade pas trop au milieu de la trépointe. En revanche la storm welt ne colle pas parfaitement à la tige, c’est un détail mineur, le jour est très faible.

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Les finitions à l’intérieur de la chaussure sont peu soignées mais là encore il n’y a rien de particulièrement problématique. Cette paire ne présente aucune indication de provenance.

Paire numéro 3

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Cette paire est une bottine de type balmoral en bi-matière achetée fin 2019.

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Deux photos qui illustrent le problème des lots pied gauche/pied droit. Les usines ne fabriquent pas des paires de chaussures, elles fabriquent des pieds droits et des pieds gauches qui sont ensuite assemblées en paire. De fait vous pouvez vous trouver avec un pied qui a été coupé dans un cuir propre et un autre dans un cuir beaucoup moins beau. C’est le cas ici. Le pied droit utilise un cuir qui frisote énormément du quartier à la claque. Le cuir présente également des différences notables de teinte. Cela n’est pas présent sur le pied gauche. Un cuir qui frisotte ne veut pas dire que le cuir va avoir une durabilité moindre, en revanche cela veut dire que le pied droit ne va pas du tout vieillir de la même façon que le pied gauche. Rappelez-vous au passage que Meermin n’utilise que le meilleur cuir, venant des meilleures tanneries d’Europe et non du cuir de pangolin contrairement à ce que certains chiens d’impérialistes aiment à raconter.

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Sur le pied gauche la ligne de perforation n’est pas droite, de plus le trou du haut n’est pas totalement percé, l’emporte-pièce n’a fait que marquer le cuir sans le trouer. C’est un défaut uniquement esthétique anodin à ce niveau de prix.

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Le pied gauche présente une cassure significative dont je ne suis pas certain de comprendre l’origine. À l’intérieur de la bottine cela est marqué par une tache noire comme si le cuir avait été chauffé très fortement. L’ouvrier a probablement eu un problème au moment du collage du renfort entre la tige et la doublure mais pour en savoir plus il serait nécessaire de démonter la bottine.

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Des plis d’aisance… sur une paire neuve ? Je n’ai jamais porté cette paire, je me suis contenté de la sortir de sa boite et de lui mettre des embauchoirs. Le pied droit n’a pas ces plis. Il semble donc très probable que cette paire ait déjà été vendue à quelqu’un, qui a essayé le pied gauche, visiblement en intérieur et pour peu de temps, la semelle gomme présente également une infime trace d’usure. Cette personne est parvenue à renvoyer la paire et Meermin s’est contenté de la remettre en circulation. À mon sens on dépasse ce qui est tolérable même dans cette gamme de prix. À son retour cette paire devait être identifiée comme défectueuse et mise en vente à un prix réduit.

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La nouvelle mention de provenance, dessinée en Majorque fabriquée en Chine. Cette paire semble être l’un des premiers modèles à avoir été intégralement produit en Chine. Jusque-là certains des modèles indiquaient une provenance Espagnole et étaient montés en Chine puis “terminés” en Espagne. Il faut tout de même noter que beaucoup (l’intégralité ?) des modèles pré 2018 n’indiquaient aucune provenance, laissant planer le doute sur la réalité de la production Majorquine de la marque.

Paire numéro 4

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Il s’agit d’une paire de double boucle en veau velours achetée durant la toute première solde de Meermin d’Avril 2020. La marque ne faisait jusque-là pas de soldes. En revanche elle revendait les paires rejetées par le contrôle qualité de l’usine sur Ebay en enchère libre, chose qu’elle a arrêtée de faire dans les mois précédents la solde. Nous pensions qu’il était possible que Meermin utilise cet évènement pour se débarrasser des paires autrefois vendues sur Ebay (spoiler : cela a bien été le cas). Nous sommes parvenus à acheter une paire malgré la grande popularité de l’évènement, toutes les paires soldées ont été vendues en moins de 24h. Lorsque les paires ont été livrées et que les retours ont commencer à apparaître sur les forums il est devenu apparent que Meermin a bien refourgué ses rejets d’usine à -25 % sans mentionner la présence de défauts. Depuis cet évènement Meermin a organisé une nouvelle solde en Novembre 2020, en précisant cette fois qu’il s’agissait bien de “factory seconds”. Connaissant leur mauvaise foi légendaire cet aveux de leur part est presque un miracle. Voici donc notre paire des soldes d’Avril 2020.

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Lorsque les chaussures sont sur la chaine de montage la tige est protégée par un plastique. Ce sont les restes de ce plastique que vous pouvez voir ici. C’est sans conséquence sur la longévité de la chaussure mais c’est en général un bon indicateur du manque de soin apporté lors de la fabrication. Au passage j’ai pendant longtemps pensé que Meermin ne protégeait pas ses tiges tant leurs souliers avaient tendance à comporter bon nombre d’éraflures et autres marques diverses. Je sais maintenant que j’avais tort, mais je me demande encore plus comment ils se démerdent pour marquer autant les tiges…

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La fameuse séparation trépointe / couche point faite à l’arrache. De plus, l'ouvrier a teinté la tige au niveau de l'emboitage. À ce niveau c'est plus qu'une simple bavure. Probablement un artiste contrarié forcé par le glorieux parti communiste chinois à travailler dans une usine de chaussure. C'est un défaut mineur mais l'application de la teinture est si régulière (à l'exception de la fin de la ligne) que l'on se demande si l'employé savait ce qu'il devait faire.

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Le défaut le plus sérieux sur cette paire. Les points sombres sont en réalité la couture trépointe. Cette couture est normalement invisible, aucune pression n’était appliquée sur la chaussure pour la photo. En forçant un peu j’arrivais à voir les fils mais je ne pouvais pas prendre la photo en même temps. Quand la couture trépointe est visible c’est souvent à cause de problèmes de tensions, et cela a tendance à fragiliser le soulier donc à nuire à sa durabilité. J’ai vu des trépointes bien plus exposées que cela, néanmoins cela justifie quand même un remplacement de la chaussure. D’autant plus qu’il y a d’autres problèmes avec cette paire.

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De la colle, de la colle PARTOUT. Ça n’a rien d’exceptionnel sur une paire de Meermin et c’est sans conséquence. Notez la mention “made in Shanghai” sur la languette.

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Une machine à coudre qui va trop loin. Dans le cas de la dernière photo l’ouvrier, emporté par son élan et son amour du parti a voulu poursuivre sa couture PP sur le couche point.

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Cette chaussure a déjà été portée et a fait l’objet d’un retour. La couture a été “écrasée” par la démarche de quelqu’un. Il en va de même avec la semelle caoutchouc qui présente également quelques légères traces d’usure.

Paire numéro 5

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Cette dernière paire a été achetée en Janvier 2021 et est donc la plus récente du lot il s’agit d’un mocassin de type bit loafer. C’est également la seule paire issue de la gamme “femme“ de notre sélection. Le volume de la gamme féminine étant moindre nous voulions voir si ces modèles faisaient l’objet d’un traitement particulier ou si le niveau de (non) finition était le même que sur la gamme homme.

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On retrouve notre ami le morceau de plastique protecteur. La déforme est toujours appliquée de façon aussi aléatoire. Le couche point forme une bosse et la couture PP n’est pas droite. En fait elle sort pratiquement de la trépointe mais cette photo ne le montre pas bien. Les sous-couches du bloc talon sont en salpa, d’ailleurs un coin a été endommagé. C’est prometteur pour la suite.

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La tige frisote un peu, il y a différentes marques, éraflures et autres décolorations. “Made just using the finest French boxcalf” qu’ils disaient. Beaucoup de ces défauts vont disparaître lors d’un premier crémage. Sinon vous pouvez également voir que coudre droit chez Meermin est optionnel. Vu le prix c’est normal, et personne ne va le remarquer. Mes commentaires sarcastiques sont surtout là pour me moquer de la communication de la marque et de ses “very skillful artisans” du parti unique.

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Là aussi la tige frisote un peu, il y a quelques fils qui se baladent, aucune finition de tranche au niveau de la languette.

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Un fil qui a sauté et des coutures pas très propres…

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Enfin on termine sur la spécialité de Meermin, une séparation trépointe / couche point faite à l’arrache avec en prime une couture PP qui déborde et un morceau de plastique coincé entre la tige et le couche point.

Conclusion

Bien que 5 paires ne représentent qu’un échantillon limité, quelques tendances se détachent. Tout d’abord il y a beaucoup de défauts cosmétiques, mais également quelques défauts plus sérieux. Par ailleurs, les deux paires les plus anciennes sont de loin les plus propres. On peut toujours spéculer sur les raisons derrière la baisse de qualité, toujours est-il que le prix a augmenté sans que le niveau de finition ne se maintienne. On peut toujours spéculer sur les raisons derrières ce déclin. Est-ce que le déplacement intégral de la production vers la Chine y est pour quelque chose ? Quelle quantité de travail était effectué en Espagne auparavant ? Néanmoins, si certains doutent encore de la provenance des chaussures voici un tableau présentant les imports de la succursale de Meermin aux États-Unis. Les pompes sont livrées par conteneur directement depuis Shanghai, il n’y a aucune raison pour qu’il n’en soit pas de même pour les ventes en Europe.

La division USA de Meermin qui importe les paires directement depuis la Chine. (Source : seaair)
La division USA de Meermin qui importe les paires directement depuis la Chine. (Source : seaair)

De la même façon il faut savoir que depuis 2016 Meermin a connu une croissance exponentielle, avec une augmentation très forte de leur capital (ils sont passés d’un million d’euros en 2016 à pratiquement deux millions en 2017). La marque en a profité pour s’internationaliser en implantant aux États-Unis une nouvelle entité commerciale qui leur permet d’avoir à la fois un point de vente mais également un centre de stockage. Est-ce l’exemple d’une société qui a grandi trop vite et n’a pas été en mesure de gérer son expansion ? Il y a juste quelques mois en août 2020 la marque a ouvert une nouvelle entité commerciale à Hong Kong. Son utilité n’en est pas encore connue mais il peut s’agir d’un magasin. Toutefois, Meermin n’étant pas propriétaire de leur usine à Shanghai il est également possible que la marque ouvre une entité de production différente. Hong Kong bénéfice d’un régime différent de Shanghai, et ce dernier est particulièrement avantageux du point de vue fiscal…

La nouvelle entité commerciale de Meermin enregistrée à HK en pleine crise du virus Chinois. Comme quoi le business n’est pas mauvais pour tous. (Source : Companies Registry HK)
La nouvelle entité commerciale de Meermin enregistrée à HK en pleine crise du virus Chinois. Comme quoi le business n’est pas mauvais pour tous. (Source : Companies Registry HK)

L’autre point à retenir est que les caractéristiques intrinsèques des souliers n’ont pas beaucoup bougé à travers les années. Les contreforts et bouts durs sont toujours aussi fins et souples par exemple, ce n’est pas pour rien que les Meermin ont tendances à devenir difformes après quelques années. Le travail des tiges est lui aussi toujours aussi aléatoire et ainsi de suite. Après il est difficile de se prononcer sur ces aspects dans la mesure ou le cahier des charges de Meermin n’a jamais été homogène à travers la gamme. Par exemple certains modèles ont un bloc talon en cuir, d’autres ont un bloc talon en salpa, et cela a toujours été le cas et résulte juste d’exigences différentes pour des modèles différents. Il n’en reste pas moins que Meermin a toujours fait des chaussures d’entrée de gamme, et qu’il y a toujours eu des ratés comme l’image suivante le démontre.

Un cousu Norvégien tressé réalisé en 2015 par Meermin. Tout simplement atroce, d’ailleurs la marque a toujours un taux de défauts hallucinant sur ses cousus Norvégiens. Les ouvriers Chinois peuvent copier bien des choses mais il reste encore des domaines qu’ils ne maitrisent pas même après 5 ans. (Source : Styleforum)
Un cousu Norvégien tressé réalisé en 2015 par Meermin. Tout simplement atroce, d’ailleurs la marque a toujours un taux de défauts hallucinant sur ses cousus Norvégiens. Les ouvriers Chinois peuvent copier bien des choses mais il reste encore des domaines qu’ils ne maitrisent pas même après 5 ans. (Source : Styleforum)

S’il y a bien une chose qui est mise en valeur par cette sélection de paires c’est la nécessité d’acheter en boutique et non plus en ligne. Acheter en ligne se résume plus à un jeu de roulette Russe qu’autre chose, alors certes c’est l’option la plus facile et la plus pratique et sans aucun doute celle qui est privilégiée par la majorité des clients mais il faut bien comprendre que cela vous expose à des déceptions. Au final, pour le prix payé Meermin reste une marque intéressante à condition de choisir vos paires. À ce prix vous avez un vaste choix de tailles, de formes, de modèles… le fait est que la marque n’offre plus la même attention aux détails que par le passé.

Bonus: le service client

L’objectif était de reproduire l’expérience d’un client normal de la marque et cela passe également par la qualité du service. Parmi nos 5 paires, 2 avaient déjà été portées, ce qui en soit en dit déjà long sur le niveau d’exigence de la marque, mais cet article n’aurait pas été complet sans un message au légendaire service client.

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